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Alors que le scandale Isabel Dos Santos fait l’effet d’une bombe dans le monde, La Libre Afrique.be a interrogé Daniel Ribant, spécialiste de l’Angola, sur lequel il a publié (1).
Q: Pourquoi est-ce que cela éclate maintenant?
R: Personnellement, je pense que la diffusion, le week-end dernier, des “Luanda Leaks” (NDLR: une enquête du consortium international de journalistes, qui ont exploité la “fuite” de 715 000 documents) n’est pas due au hasard – même si je respecte beaucoup le travail des journalistes. Il semble y avoir un calendrier et une stratégie précis. Le mouvement s’est accéléré depuis décembre 2019, quand un organe mis sur pied depuis l’accession au pouvoir de Joao Lourenço (2017) – avec notamment l’aide des Etats-Unis – le Service de recouvrement des avoirs, a vu son travail de traçage des avoirs à l’étranger arriver à maturité. Ce mois-là, le tribunal provincial de Luanda a émis une ordonnance de saisie conservatoire des fonds d’Isabel Dos Santos, de son mari Sindika Dokolo et de leur conseiller portugais, à la demande de ce Servce de recouvrement qui a présenté des documents à l’appui de sa demande. C’était la première attaque. Et, pour la première fois, apparaissait le nom de l’ex-président José Eduardo Dos Santos, pour avoir permis le rachat, par des fonds publics, d’un joaillier genevois privé en faillite, De Grisogono, au bénéfice du couple Isabel Dos Santos-Sindika Dokolo, et pour avoir mis au point un système par lequel les diamants de la société angolaise publique Sodiam étaient vendus à ce joaillier en dessous des prix du marché.
Les “Luanda Leaks” ne tombent donc pas du ciel. Il faut savoir que Luanda a refusé de livrer au Portugal, où il est inculpé, un homme accusé de corruption active et blanchiment, l’ex-vice-Président de José Eduardo Dos Santos, Manuel Vicente, assurant qu’il serait jugé en Angola. Je crois qu’il a bénéficié de cette protection en échange d’informations. Tout le monde parle d’Isabel Dos Santos mais, sans aller jusqu’à dire qu’elle n’était qu’un prête-nom, c’est le système de José Eduardo Dos Santos. En filigrane, c’est lui qui est visé.
Q: Cela veut-il dire que le président Joao Lourenço est de plus en plus fort?
R: Je ne le traduirais pas comme ça. Si les montages du clan Dos Santos étaient connus des observateurs attentifs de l’Angola, la dimension internationale que l’affaire a prise – puisque des sociétés dans 21 pays sont concernées – a fait l’effet d’une bombe. Selon moi, ce n’est pas bon pour l’Angola: cela pourrait avoir des effets pervers sur les tentatives de Luanda de séduire des investisseurs, qui pourraient se dire: dans quoi vais-je me mettre?
De plus, s’il est normal, pour s’attaquer à la corruption, de commencer par Jose Eduardo Dos Santos, qui en est l’épicentre, on dit déjà que le président Lourenço doit aussi s’en prendre aux autres, dans la nomenklatura, qui ont suivi son exemple. Cela pourrait déclencher un cataclysme, avec des conséquences dans le parti au pouvoir, le MPLA, où un courant se demande déjà où tout cela va s’arrêter.
Tout en étant bien conscient de la dimension morale du dossier, je ne peux m’empêcher de dire qu’une négociation directe avec les Dos Santos aurait été préférable: elle aurait permis un apport de fonds rapide, aurait moins endommagé l’image du pays et suscité un moindre raidissement du clan Dos Santos.
Q: Y a-t-il une chance pour que l’Angola récupère tout cet argent public détourné?
R: Peut-être une partie. Mais cela prendra beaucoup de temps puisqu’il a été placé dans plus de 400 sociétés et qu’Isabel Dos Santos – qui s’est toujours entourée de bons avocats et fiscalistes – fera tout ce qu’elle peut pour rendre longues et difficiles les procédures de récupération. C’est pourquoi une bonne négociation aurait été préférable. Sans compter que les Dos Santos sont au courant d’autres dossiers gênants, touchant cette fois des gens aujourd’hui au pouvoir.
Q: Où vit Isabel Dos Santos aujourd’hui? Y a-t-il une possibilité qu’elle soit jugée?
R: Elle a la double nationalité russe – par sa mère – et angolaise. L’an dernier, elle a fait faire d’importants travaux dans sa maison de Londres. On parle aujourd’hui de Dubaï, où elle a plusieurs sociétés. Quant à être jugée, la justice angolaise semble décidée à poursuivre. Je viens d’apprendre qu’une procédure judiciaire vient d’être entamée dans le dossier Sonangol: le jour de son limogeage de la tête de la société d’Etat pétrolière, elle a fait un transfert d’argent vers un compte au Portugal en transit pour un compte à Dubaï, où elle était l’ayant-droit économique. On est sans doute au début d’une action beaucoup plus large.
Libre Afrique
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Affaire Dos Santos: « On est sans doute au début d’une action beaucoup plus large »
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